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Présentation des communiqués de presse de l'OPMA

- Communiqué de presse du 2 mars 2000

Observatoire des Pratiques de la Montagne et de l'Alpinisme

La loi, la montagne et le sport
Il y a sports et sports...

Le projet de loi relatif à "l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives", a déjà fait l'objet, le 22 février, d'un communiqué de l'OPMA mettant en cause ses articles 9 sect VI, 12 II sur la réglementation des espaces naturels et l'article 32 sur l'exigence de diplômes. D'autres articles ont également suscité la protestation des guides et des moniteurs de ski. Ceux-ci demandent, à juste titre, le maintien, dans leur spécificité et leur exigence, des diplômes nationaux délivrés par le Ministère de la Jeunesse et des Sports, ainsi que le maintien de la formation qui s'y rapporte, organisée par l'Ecole Nationale de Ski et d'Alpinisme, sous la responsabilité du Ministère.

De son côté, poursuivant la réflexion qui lui est propre, l'OPMA veut encore saisir l'occasion des discussions que provoque ce projet de loi, pour contester fermement une image réductrice et inacceptable qu'il donne des "activités physiques et sportives" pratiquées dans des espaces naturels tels que la montagne, ou la mer également. En effet, dans ce texte comme dans l'esprit de la plupart des citadins, il semble que ces activités soient toutes rangées dans les catégories de sports qui exigent des sites aménagés, des animateurs diplômés, et dont la compétition est la motivation la plus forte *.

On ne peut reprocher au Ministère de la Jeunesse et des Sports de s'intéresser à ce type de sports. Mais il est regrettable de laisser croire que toutes les activités physiques et sportives, notamment en montagne, sont du même type. Il est regrettable d'accréditer l'idée trop communément admise, que tous les "sports" dignes de ce nom obéissent à des règles fixées ou garanties par décret, qu'ils sont encadrés et situés dans des lieux sécurisés. C'est l'idée dont la presse dite sportive imprègne ses lecteurs puisque les sports dont elle parle sont, presque toujours, ceux où la valeur se mesure en secondes, en mètres ou en points, à moins que ce ne soit en milliers de spectateurs ou de francs.

Une telle image du sport ne convient ni à l'alpinisme, ni à la randonnée qui sont, par définition, des activités physiques de pleine nature - les APPN.
Certes, la performance et la compétition y ont pris place, mais dans des conditions que personne ne considère comme celles de la pratique ordinaire et commune de ces "sports". Quand cela se produit, il s'agit alors d'activités sportives certes légitimes, mais qui, lorsqu'elles ont lieu en montagne, supposent une triple réduction de celle-ci: réduction de l'espace à un site aménagé, réduction de l'ascension au parcours d'une voie équipée, réduction de l'aventure à une compétition.

Là n'est cependant pas l'essentiel. Pour ceux qui les pratiquent de manière autonome et responsable, l'alpinisme et la randonnée à pied ou à ski consistent en parcours tournés vers l'aventure et la découverte d'un "milieu" dans sa globalité. Les facettes multiples qui le caractérisent en font une réalité vivante, souvent imprévisible et surtout non mesurable car irréductible à quelques paramètres chiffrables. L'OPMA a déjà eu l'occasion de le dire (cf. "Les dangers de la montagne, la montagne en danger", juin 1999).

Il faut insister! Parce qu'ils sont de pleine nature, l'alpinisme (y compris l'escalade en falaise) et la randonnée en montagne comportent deux aspects qui en déterminent et la spécificité et les conditions d'exercice.

1. Pour les activités de ce type, pratiquées dans des espaces qui doivent rester non (ou très peu) aménagés, c'est d'abord le milieu qui impose ses exigences, tandis que pour les autres sports, des règles formelles sont données a priori. C'est dire que pour tous les sports situés dans un espace plus ou moins aménagé, l'homme dicte sa loi, tandis que pour les sports de pleine nature, c'est le milieu naturel qui impose la sienne. Il s'agit de deux approches de la montagne dont il importe de respecter les différences, alors même qu'elles se mêlent parfois.
L'une est, avant tout, confrontation de l'homme avec lui-même et avec ses semblables dans des conditions définies comme les règles du jeu. L'autre est, avant tout, confrontation avec une réalité naturelle que l'on souhaite fréquenter et dont, pour mieux la connaître, il faut surmonter les résistances et les obstacles. Ces deux approches induisent deux types de pratiques dont on ne peut laisser l'un modeler l'autre au point de le repousser dans l'oubli ou dans une sorte de clandestinité.

2. L'autre aspect significatif d'activités telles que l'alpinisme ou la randonnée en montagne, met l'accent sur leur caractère aléatoire parce qu'impossibles à tenir dans des règles strictes, ou à l'abri de tout danger. Quelque précaution que l'on prenne, quelque compétence que l'on ait acquise, il faut avoir conscience que l'imprévu est à prévoir, que le risque peut surprendre. La conduite à tenir est affaire d'appréciation , à un moment donné, du rapport entre les personnes et le milieu naturel où elles évoluent. Dans les moments critiques, ce n'est pas la règlementation qui compte, mais la capacité d'appécier la situation et de décider.
Il en résulte que, si un accident se produit, on devra assurément, dans la recherche de la responsabilité, établir s'il y a eu faute: le Code pénal fait référence à la maladresse, l'imprudence, l'inattention ou la négligence. Mais ces notions manquent inévitablement de précision puisqu'il n'y a pas de règle permettant de les mesurer ou de les qualifier. Aussi faudra-t-il surtout parler d'erreur d'appréciation et non pas d'infraction. S'il n'y a pas eu de violation de réglementation, son évaluation doit sortir du champ pénal, et lorsque l'erreur est la cause reconnue de l'accident, c'est bien de responsabilité civile qu'il s'agit.
De telles considérations ne sauraient concerner les sports codifiés, pratiqués dans des conditions et des espaces bien définis. Mais elles ont quelque pertinence pour les activités sportives de pleine nature. Aussi est-il temps de se demander si, dans bien des cas, les tribunaux n'ont pas été saisis indûment au pénal, alors qu'il aurait été suffisant qu'une juridiction civile se prononce sur la responsabilité d'un accident.
L'OPMA souhaite vivement que la discussion qui, sur ce point, a été engagée récemment, soit poursuivie et aboutisse publiquement.

* Les sports sont habituellement classés en 4 catégories (sports mécaniques exceptés).
D'une part, en prenant en considération le type d'obstacle, on distingue:

- les sports de combat et duels en tous genres;
- les jeux de balle qui introduisent une distance et une symétrie entre les adversaires;
- l'athlétisme où entrent en jeu la performance, ainsi que la maitrise et l'élégance du geste;
- les sports de nature qui consistent à relever le défi d'un milieu donné.
D'autre part, en prenant en considération les espaces, on distingue:
- des espaces restreints et couverts (salles, rings, p. ex.);
- des espaces construits, ouverts et clos (stades, tennis, p. ex.);
- des espaces naturels, ouverts et aménagés (pistes de ski, golf, p.ex.);
- des espaces naturels, non aménagés, désignés par l'activité considérée (montagne, mer, etc)

- Communiqué de presse du 22 mars 2000

Malgré les premières modifications proposées par le Sénat, l'OPMA considère que le projet de loi sur le sport présente, en l'état, des dangers manifestes pour les activités physiques de pleine nature, notamment la randonnée, l'escalade, l'alpinisme.

1 - L'obligation pour les encadrants bénévoles d'être diplômés aura pour conséquence:

- soit de tuer le bénévolat et de provoquer l'enchérissement des activités pour les pratiquants,
-soit de faire passer les sorties collectives des clubs dans la clandestinité, avec en corollaire une augmentation des accidents,
- soit de conduire à la délivrance de diplômes au rabais.

2 - La réglementation des espaces naturels, de leur équipement et des conditions d'accès laisse croire que la montagne peut-être transformée en stade, ce qui nous paraît dangereux pour tous. On peut aussi craindre qu'une telle réglementation porte en germe des interdictions et des obligations semblables aux exigences qu'on a connues dans le système soviétique d'il y a une trentaine d'année où il fallait faire preuve d'une qualification pour obtenir un "permis d'ascension" de tel ou tel sommet, et qu'on rencontre aujourd'hui sous d'autres formes, dans les parcs américains.

Bernard Amy Président