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Comme en France, les pratiquants du ski de randonnée qui remontent les pistes des stations de ski en Suisse posent problèmes pour de soi-disant questions de sécurité. Avant d'atteindre les sommets, les randonneurs utilisent parfois les pistes damées ce qui, parait-il, peut créer du danger.... mais jamais rien n'a été prouvé concrètement.

Ces randonneurs qui inquiètent

Cohabitation de plus en plus difficile entre les skieurs et les randonneurs qui empruntent parfois à contresens leurs pistes balisées et qui, en soirée, peuvent gêner les engins de damage.

- Les faits

Exaspérée par le nombre de randonneurs qui empruntent ses pistes de ski à contresens, la station de Diavolezza, en Haute-Engadine (GR), a décidé de faire passer les amateurs de peau de phoque à la caisse. Les mauvais payeurs encourent même une amende de 100 francs. Dans les Alpes vaudoises et sur le domaine des Portes-du-Soleil (VS), les directeurs des sociétés de remontées mécaniques relèvent que la cohabitation est de plus en plus difficile entre usagers des pistes et adeptes de ski-alpinisme.

A Diavolezza, petite station grisonne située au pied du Piz Bernina, les randonneurs ne sont plus tout à fait en odeur de sainteté. Du moins ceux qui remontent les pistes de ski quand d'autres les descendent à toute allure. "Il y a un réel problème de sécurité, là-haut. Les amateurs de peau de phoque arrivent par cars entiers depuis l'Italie, où ils sont interdits de piste. Diavolezza compte jusqu'à deux cents randonneurs par jour", explique Felix Maurhofer, porte-parole des Remontées Mécaniques Suisses (RMS). Aussi, la nouvelle politique de ce domaine skiable est depuis peu de taxer l'utilisation des pistes à la montée également: désormais, les randonneurs s'acquitteront donc d'une contribution de 26 francs, voire d'une amende de 100 francs en cas de non-paiement. Une manière de les assujettir eux aussi aux règles de bonne conduite applicables sur la neige damée.

- Problème diurne et nocturne

"Ce phénomène s'observe également chez nous. On essaie de mettre en garde les randonneurs, mais ils se montrent assez souvent arrogants. Pourtant, le danger existe bel et bien, à la fois pour eux et pour les skieurs et snowboardeurs qui paient l'utilisation des remontées mécaniques", souligne Gilles Cottet, directeur de Télé-Leysin SA.

Déjà difficile de jour, la cohabitation devient franchement périlleuse de nuit, lorsque les engins de damage des pistes entrent en action. "Ces machines utilisent des treuils munis d'un câble d'une longueur pouvant aller jusqu'à mille mètres. Par chance, il n'y a pas eu d'accident à ce jour", relève pour sa part Jean-Paul Jotterand. Le directeur de Glacier3000, aux Diablerets, confie appliquer en la matière une politique relativement souple vis-à-vis des randonneurs: "Disons que nous les tolérons en bordure de piste, pour autant qu'ils pratiquent leur sport pendant les heures d'ouverture des installations."

A Morgins (VS), c'est la tolérance zéro qui prévaut. "Les amateurs de ski-alpinisme qui s'entraînent en remontant les pistes sont assimilables à des automobilistes qui rouleraient à contresens sur l'autoroute. Il y a deux ans, nous avons par conséquent décidé d'apposer des panneaux interdisant cette pratique. Des pictogrammes ad hoc sont d'ailleurs en cours d'homologation", déclare Jacques Nantermod, directeur de Télémorgins SA, qui constate que le phénomène est en nette augmentation depuis cinq ans. Développement du ski-alpinisme ou pas, les exploitants de ces différents domaines skiables sont unanimes à vouloir protéger leurs clients et à faire respecter la qualité du travail d'entretien effectué de nuit par leurs collaborateurs. Pour autant, nul ne se hasarde à évoquer la solution d'une taxe imposée aux randonneurs. Dans ce domaine, on s'en tiendra donc pour l'heure à répéter les principes les plus élémentaires de prévention et de fair-play.

Edouard Chollet
Source: 24 heures.ch

- Une mesure à la légalité douteuse

- Taxe: La nature devrait rester accessible à tous.

Viendrait-il à l'idée d'une station d'interdire aux promeneurs de se balader ici ou là? La question, mais plus encore sa réponse, montre bien que la légalité d'une taxe imposée aux randonneurs est pour le moins douteuse. Pour s'en convaincre, on attendra donc les premiers recours éventuellement déposés par les utilisateurs "indus" du domaine skiable de Diavolezza. Dans une récente communication interne, le juriste des Remontées mécaniques suisses rappelle d'ailleurs que les moyens légaux destinés à juguler l'utilisation indésirable des pistes sont limités, alors que tout-puissant au pays du tourisme est le principe du libre accès à la nature.Cela étant, l'homme de loi relève que les sociétés de remontées mécaniques ont un devoir de diligence. Elles sont ainsi tenues de mettre à disposition de leurs hôtes payants des pistes sûres et entretenues. Quant à ceux qui ne paient rien pour leur utilisation, la Commission des questions juridiques relatives aux descentes pour sports de neige leur rappelle qu'ils sont tenus de se conformer aux directives de sécurité, faute de quoi ils agiront exclusivement à leurs risques et périls. La société alpine allemande a, quant à elle, rapidement empoigné le problème en édictant 10 règles de conduite à l'intention des randonneurs. Des règles qui, pour l'essentiel, les placent face à leurs propres responsabilités.

E. C

- "C'est aux randonneurs de prendre les précautions qui s'imposent"

Interview Express de Gilbert Gonet, chef technique du Trophée du Muveran.

- Pourquoi y a-t-il des problèmes de cohabitation avec les randonneurs?

- Idéalement, il faudrait que les adeptes du ski-alpinisme puissent s'entraîner en pleine nature, mais les conditions d'enneigement font qu'ils se rabattent souvent sur les pistes de ski. Un athlète doit impérativement faire ses 1.500 mètres de dénivellation chaque week-end.

- Que pensez-vous de la décision de Diavolezza de les assujettir à une taxe pour y avoir droit?

- Cela ne va pas améliorer les choses, parce que les randonneurs se considéreront alors comme des utilisateurs de plein droit de ces pistes.

- Ce qui ne réglera pas les questions de sécurité...

- C'est à nous, randonneurs, de prendre les précautions qui s'imposent, de rester en bordure des pistes, d'être bien visibles.

- Apparemment, il y en a qui ne veulent pas le comprendre.

- Je ne nie pas qu'il y ait des mauvais coucheurs dans nos rangs. En fait, il faut apprendre à respecter l'autre. Voyez-vous, je fais également beaucoup de VTT en montagne. Eh bien, je ne me suis jamais fait engueuler par des promeneurs.

- On pourrait aussi, comme à Morgins, interdire la pratique de la peau de phoque sur les domaines skiables.

- Je le déplorerais. A l'échelle mondiale, les compétiteurs suisses de ski-alpinisme sont les plus titrés de la discipline. S'ils ne pouvaient plus s'entraîner, c'en serait fini de cette suprématie.

E. C
Source: 24 heures.ch