Erreurs grossières ou grossières erreurs?
Manipulation de l'information ou mauvaise information?
Difficile de se faire une idée sur le comportement de la presse et des médias. Mais également difficile d'imaginer qu'un journaliste de l'AFP fasse autant d'erreurs en si peu
d'espace. Peut-on parler d'incompétence professionnelle ou de tentative de manipulation comme il se fait jusqu'ai sein du Ministére de l'écologie depuis 25 ans?
Le fait est que sur un sujet chaud et délicat, avec la notoriété de l'AFP, la diffusion et la reprise de telles informations peut conduire à de nombreuses incompréhensions voir
même à des réactions violentes.
L'affaire de l'ours n'est plus, aujourd'hui, un simple fait divers. Il est avant tout un choix de société, un choix d'aménagement du territoire dans le cadre du développement
durable et pas seulement un choix et une décision écologique de maintien d'une espèce sauvage.
Dans ces conditions, un peu plus de sérieux s'impose.
- La liste des erreurs de l'AFP
Dans son édition du 22 août 2006, le Figaro reproduit un article de l'AFP. Quelles sont les erreurs?
- "Réintroduction": je ne crois pas que le terme de "réintroduction" soit le bon. Il y a toujours eu des ours dans les Pyrénées. Il ne peut donc pas y avoir de réintroduction
puisqu'il y en a déjà. Ce ne peut être qu'un introduction ou un renforcement de population. Par contre, si des ours étaient introduit artificiellement dans les Alpes ou le Massif
Central ou en Corse, il s'agirait bien d'une réintroduction puisqu'il n'y en a plus depuis un certain temps.
- Le calendrier proposé est assez surprenant.
- "Mai et juin 1996: Trois femelles lâchées...".
Erreur! Les lâchers se sont faits en 1996 et 1997 avec 2 femelles (Melba et Ziva) et un mâle (Pyros)
- "2000: les manifestations se multiplient en France.": oui mais pas seulement contre l'ours. Egalement contre le loup
- "2003: Les éleveurs imputent à l'ours la mort de 70 brebis ". c'est pour le moins restrictif. Comme s'il n'y avait eu que cette prédation en 10 ans.... Ce sont
plusieurs centaines de brebis qui ont été tuées par l'ours ou qui ont disparues du fait de ses attaques.
- "25 avril 2005: Une manifestation entrave le lâcher de la première ourse...", "28 avril et 17 mai 2005: Lâcher de la 2e et de la 3e ourse..."... Je crois qu'il faut lire
2006 et non 2005... une année de décalage....
- "2 octobre 2005: Des opposants au projet de réintroduction tronçonnent des arbres en travers de routes pyrénéennes pour empêcher le lâcher d'une ourse.
"Non! Il n'y a pas eu de lâcher à cette date. Cette manifestation d'ariégeois était pour les "automnales" du pays de l'ours à Massat, une grande kermesse dont il semble
qu'elle est en partie financée par la DIREN (Ministère de l'Ecologie) pour la "promotion" de l'ours.
- Il n'est fait mention que des manifestations conflictuelles mais aucune mention des manifestations pacifiques de Luchon et Bagnères de Bigorre auxquelles les correspondants de
l'AFP étaient présents.
- "2 juin 2006: Un mâle, Balou, est libéré dans les Pyrénées." Question: qui l'avait fait prisonnier? Le terme de "libération" est pour le moins mal choisi.
Louis Dollo, le 23 août 2006
- L'article de l'AFP paru dans le Figaro
Réintroduction de l'ours: 15 ans d'affrontement
- La lutte fait rage entre ses partisans et ses détracteurs
- 1990: Les 150 ours pyrénéens des années 1900 ne sont plus que 7 ou 8. L'Etat ratifie la Convention de Berne, qui protège l'ours, et décide avec le soutien de l'UE de
réintroduire l'ours, grâce à des captures en Slovénie.
- Mai et juin 1996: Trois femelles lâchées dans les Pyrénées. Manifestations de professionnels du tourisme et d'éleveurs, en Espagne et en France.
- 2000: les manifestations se multiplient en France.
- 2003: Les éleveurs imputent à l'ours la mort de 70 brebis.
- 1er novembre 2004: Une femelle, Canelle, abattue par un chasseur qui déclare avoir été attaqué. Un millier de manifestants pro-ours le 6 novembre à Paris et le 28 novembre
dans les Pyrénées. Le nombre d'ours est évalué entre 14 et 18.
- 13 janvier 2005: Le ministère de l'Ecologie annonce un plan de réintroduction de cinq femelles slovènes en 2005.
- 25 avril 2005: Une manifestation entrave le lâcher de la première ourse qui doit se dérouler 40 km plus loin. La ministre de l'Ecologie, Nelly Olin, s'emporte en dénonçant
"la bêtise humaine".
- 28 avril et 17 mai 2005: Lâcher de la 2e et de la 3e ourse.
- 2 octobre 2005: Des opposants au projet de réintroduction tronçonnent des arbres en travers de routes pyrénéennes pour empêcher le lâcher d'une ourse.
- 1er avril 2006: une manifestation dégénère à Arbas avec le jet de sang sur la mairie. Un manifestant de l'Association pour la sauvegarde du patrimoine d'Ariège-Pyrénées
(ASPAP) dénonce une "écologie de salon" et le danger que représente l'ours.
- 9 mai 2006: Le Conseil d'Etat rejette les arguments des opposants et autorise la poursuite des cinq lâchers d'ours.
- 2 juin 2006: Un mâle, Balou, est libéré dans les Pyrénées.
- 20 juillet 2006: 500 éleveurs viennent soutenir à Saint-Gaudens les dix personnes poursuivies après la manifestation violente du 1er avril.
Auteur: AFP.
Source: Le Figaro du 22 août 2006: 13h22
- Observations
Il est probable que les éleveurs communiquent mal. Mais est-ce leur métier?
A la suite du lâcher de l'ourse "Sarousse", de nombreux médias ont eu beaucoup de difficultés pour joindre des éleveurs. Normal! A cette période de l'année ils sont auprès de
leurs troupeaux en montagne dont certains se font attaqués pratiquement tous les jours et nuits. C'est aussi la période où ils sont occupés à ramasser l'herbe, le foin, qui
servira de nourriture aux bêtes cet hiver. Contrairement aux écologistes patentés, ils ne sont pas dans un bureau pour prendre des décisions et attendre que l'on vienne les
interroger pour exprimer leur état d'âme. Ils n'ont pas de personnel à leur service. Ils travaillent sur le terrain tous les jours, quelque soit les conditions et les événements,
qu'ils soient éleveurs-bergers avec ou sans certificat d'étude, docteur en sociologie (ça existe!), ingénieur agronome, accompagnateur en montagne ou encore, jeunes ou vieux...
C'est ça la réalité de l'élevage en montagne.
Louis Dollo, le 23 août 2006