La situation vécue par les éleveurs et bergers alpins confrontés à la diffusion générale du loup est catastrophique. Le pire dans les Alpes du Sud, et le problème s’étend aujourd’hui bien au delà de ce massif: la situation échappe, n’est plus maîtrisée, un effet boule de neige est en marche … jusqu’où et jusque quand?
Le récent séminaire de Valdeblore en juin dernier a montré comment, après avoir tout essayé depuis 20 ans de mise en œuvre de pratiques et de dispositifs de protection des troupeaux contre la prédation, l’on arrivait à une impasse en particulier parce que le loup s’adapte à tout et que sa «peur ancestrale vis-à-vis de l’Homme ne semble plus opérer» (1). Et le directeur du CERPAM concluait ainsi la synthèse finale où il soulignait cette impasse et l’impuissance de chacun:
«Pour autant, comment va-t on construire une réflexion aboutie sur l’avenir des activités d’élevage pastoral qui ont façonné des territoires ruraux et montagnards riches en biodiversité, chercher des consensus, trouver des compromis, voire opérer des choix, dans un contexte où des groupes sociaux, des institutions, d’autres activités économiques cherchent à y trouver un semblant de nature sauvage» (autour du concept de «wildernes»)?
Le loup est également un révélateur du choc de ces conceptions dans la gouvernance et les choix d’aménagement des territoires...
LIFE and human coexistence with large carnivores (LIFE et la cohabitation de l’homme avec les grands carnivores) Luxembourg: Publications Office of the European Union, 2013: le dernier document publié par l’Europe offre une vue d’ensemble de la situation du loup dans le territoire de l’UE, et de la place qu’y occupent les Alpes. La pièce jointe 1 propose une traduction des pages et de la carte concernés.
Les chiffres bruts sont une chose, le contexte dans lequel ils s’inscrivent une autre. Ce contexte, qui leur donne un sens très différent de celui habituellement envisagé, est l’objet d’une analyse dans la pièce jointe 2.
Une Europe sous influence, celle d’un puissant lobbying organisé par le WWF dans les années 90 en faveur du concept de «wilderness» qui a conduit la politique environnementale de l’UE à accorder une place démesurée, et unique, aux grands carnivores: «objectif non négociable … sur ce point il ne peut y avoir de compromis», écrivait en 2002 L. Boitani, directeur de ce lobby, à propos de loups et de cohabitation.
Les chiffres recontextualisés du document de 2013 montrent comment rien ne justifie cette place excessive alors que par ailleurs, sur ce qui est la base de toute la nature, la biodiversité des sols, c’est Janez Potočnik lui-même, Commissaire européen pour l’environnement, qui écrivait à son propos en 2010: «/Elle/ constitue un pan entier de la biodiversité mondiale trop souvent négligé.» (2). Mais, pour elle, pas de lobbying!
En France, la liste rouge des espèces menacées constitue une autre forme de manipulation. Comme par hasard elle «oublie» de mentionner le % par rapport au niveau mondial des espèces présentes sur son territoire: avec 0,11% les loups n’apportent strictement rien à l’avenir de cette espèce qui se porte très bien au niveau mondial, et les sommes englouties à son sujet seraient bien mieux investies là où des problèmes réels existent. C’est ce que demandent les directives mondiales pour l’établissement des listes rouges nationales: établir des priorités de conservation en fonction de ce %. On fait l’inverse.
Auteur: B. Besche-Commenge – ASPAP/ADDIP – 4 septembre 2013
(1) Séminaire de Valdeblore, 3 et 4 juin 2013, CERPAM, Chambre d’Agriculture des Alpes Maritimes. Conclusion
(2) L’usine de la vie. Pourquoi la biodiversité des sols est-elle si importante? - Luxembourg , UE, 2010
(3) Grenelle de l'environnement - Septembre 2007