Le bien-être animal est une nécessité évidente pour un bon éleveur, quelque soit sa filière, afin d'obtenir un produit de qualité? C'est également le moyen
pour que les bêtes se développent et soient le plus rentable possible. Cela fait partie de la bonne gestion du cheptel.
Le bien-être animal ce n'est pas seulement respecter des règlements. C'est aussi être capable de bon sens et d'adaptation au milieu et à la situation. Une
stabulation libre en montagne selon les règles européennes n'est pas forcément la meilleure des solutions pour assurer un bien-être aux animaux durant l'hiver.
Le regroupement nocturne de brebis pour des raisons diverses n'est pas, à priori, la solution la mieux adaptée au bien-être selon la race d'ovins.
Il faut donc moduler certaines affirmations et exigences et tout simplement s'assurer si un troupeau est en bon état ou non. C'est le rôle du professionnel de
l'élevage, pas celui de l'écologiste ou de l'animaliste dont beaucoup de plaintes relèvent de l'abus de droit. Ces mêmes associations ont-elles conscience des
conditions dans lesquelles meurent ou sont blessées les bêtes par les grands carnivors ours, loups et lynx?
Le 1er janvier prochain, un nouveau pan du règlement européen relatif à la protection des animaux de ferme pendant le transport entrera en vigueur. Parmi les grandes avancées,
l'obligation faite aux nouveaux véhicules de transport de bétail de mettre en place un système de navigation par satellite. Cette obligation s'étendra à tous les véhicules d'ici
2009 et devrait permettre de vérifier la bonne application de la réglementation sur la durée des voyages.
Au 1er janvier également, et pour des trajets supérieurs à 8 heures, des systèmes de contrôle et d'enregistrement de la température devront être mis en place. Des systèmes
de ventilation devraient donc être obligatoires dans les véhicules pour qu'à tout moment la température soit maintenue entre 5°C et 30°C, avec une tolérance de plus ou moins 5°C.
En l'état, cette réglementation ne dit pas que faire pour les transporteurs au cas où la température s'élève en cours de route. A noter également, que la France discute actuellement
avec Bruxelles pour assouplir cette dernière règle et négocier des tolérances plus larges que les 5°C alloués.
Auteur: Cécile Fargue
Source: Univers Nature du 21 novembre 2006
Le propriétaire d'un élevage de plus de 300 bovins à Supt (Jura), dont la moitié avait dû être euthanasiée et l'autre moitié évacuée après des maltraitances en janvier, a été condamné mardi à trois mois de prison ferme par le tribunal correctionnel de Dole (Jura). La soeur de l'éleveur, âgée de 53 ans, a été condamnée à trois mois d'emprisonnement avec sursis. Sur les 325 animaux pris en charge mi-janvier par les services vétérinaires, près de 150 avaient été euthanasiés, dont une centaine pour non-identification et une cinquantaine en raison de leur état déplorable par manque de soins, de nourriture et d'eau. Le propriétaire de l'élevage avait déjà été condamné en 2004 pour exploitation non autorisée d'une installation de plus de 100 animaux, et un cousin s'était alors proposé pour reprendre le cheptel déjà mal en point. Mais le propriétaire de 57 ans, très endetté, avait gardé le troupeau sans avoir les moyens de le soigner, et ses voisins avaient fini par alerter les services vétérinaires.
Source: Le Fil Info du 17 juillet 2007
Un rapport sur le bien être animal doit être remis fin juin au président de la République.
Entre les défenseurs de l'élevage comme manière de "cocooner" les animaux, et ceux qui dénoncent la cruauté des manières employés par l'industrie agro-alimentaire, le débat fait
rage.
"Le concept de "production animale", le fait d'utiliser les animaux comme une matière première à transformer, date du XIXe siècle, mais il a été appliqué à échelle industrielle ces
dernières décennies, rappelle Jocelyne Porcher, sociologue à l'Institut National de la Recherche Agronomique (Inra).
L'animal a alors été formaté au système de production industriel, à la fois en augmentant la productivité par tête et en supprimant chez lui ce qui faisait entrave à cette quête de
résultats.
Pour le porc, le système a été poussé à son maximum et concerne plus 90 % de la production annuelle des 25 millions de têtes en France. "Qui sait encore que le porc est un animal
social et qui broute de l'herbe?", interroge Jocelyne Porcher.
La prise en compte du bien-être de l'animal
Sans cultiver la nostalgie ou idéaliser les pratiques anciennes, la filière porcine n'échappera cependant pas à la nécessité de renouer avec les besoins de l'animal, les
réglementations imposant peu à peu de prendre en compte son bien-être.
En attendant, grâce à la sélection génétique de lignées hyperprolifiques, une truie qui mettait bas 16 porcelets par an en 1970 en met bas aujourd'hui 27, et jusqu'à 31 pour
les plus performantes, à raison de 2,3 portées par an.
Ses 14 tétines ont mal résisté à cet excès de sollicitations, d'autant plus que, maintenue en cage, la truie ne peut échapper à la voracité de ses petits. Pour éviter les blessures
aux mamelles, s'est donc généralisée la section à la pince ou le meulage des dents des porcelets.
Rapidement sevrés, les mêmes porcelets, engraissés sur caillebotis dans des bâtiments, ont pris la fâcheuse habitude de grignoter la queue de leurs congénères pour remédier à leur
désoeuvrement (en milieu naturel, ils passent leur temps à fouiller et retourner le sol).
Pour éviter cette caudophagie, "forme douloureuse d'anomalie du comportement observée dans des conditions d'élevage intensif", comme la définit l'Agence européenne
de sécurité des aliments (Efsa), s'est institutionnalisée la pratique de la caudectomie ou coupe de la queue.
Ces mutilations pratiquées peu après la naissance des porcelets se sont ajoutées à la pratique ancienne de la castration visant à éviter un éventuel goût trop prononcé à la viande.
Dans la filière porcine, ces interventions s'appellent "soins des porcelets".
Pendant neuf ans, Christine Tribondeau a réalisé ces soins dans les services "maternité" de différentes porcheries. "Un travail pénible et douloureux; l'animal crie dans les
oreilles", se souvient-elle.
"La truie est une machine à reproduire, il faut prendre soin de la machine, explique-t-elle, déclencher l'une après l'autre la mise bas avec des hormones, "fouiller" la truie quand
elle est fatiguée ou pas assez tonique, c'est-à-dire aller chercher les derniers porcelets au fond de l'utérus. Pas question de prendre le risque de perdre le ou les derniers
petits, ceux qui font la marge."
"On achève les trop frêles en les assommant"
Cependant, sur ces portées de 15, voire plus, tous ne sont pas viables.
L'Institut Technique Porcin fait état de l'impact "défavorable de la prolificité sur la mortinatalité" et analyse les problèmes d'anoestrus (périodes sans ovulation), de chaleurs
tardives, de truies vides, d'avortements, de petites portées, petits momifiés ou tout simplement d'une baisse du poids moyen des porcelets.
"Ceux, trop frêles, qui n'ont pas la force de téter, on les achève en les assommant", poursuit Christine Tribondeau. Les salariés doivent ainsi abréger les souffrances de manière
répétitive et collecter les porcelets morts.
"Il ne s'agit pas de faire montre de sensiblerie. Dans un élevage traditionnel, l'éleveur est aussi confronté à la mort de ses animaux", reconnaît Jocelyne Porcher, la sociologue
de l'INRA.
Pourtant, cela n'a rien à voir, selon la sociologue:
"Alors que l'élevage traditionnel consiste à créer des liens privilégiés avec les animaux, l'organisation du travail dans la filière industrielle impose la cruauté. Ce système
contient intrinsèquement une violence qui va au-delà de la violence perpétrée contre les animaux, c'est une violence humaine, une violence à l'égard de la vie."
"Les abattoirs ne veulent plus des animaux malades qui ralentissent la chaîne"
Et la scientifique de décortiquer le système:
"Les bêtes chétives, les truies sous-productives, celles qui ont une mammite, un problème de boiterie (fréquent à la suite de plaies aux pattes) ou qui ne prennent pas
l'insémination sont éliminées. On ne soigne pas, on tue. Et comme les abattoirs ne veulent plus des animaux malades qui ralentissent la chaîne, il revient aux éleveurs de tuer
eux-mêmes les bêtes.
Pour ce faire, la filière porcine organise des formations pour tuer proprement, en asphyxiant, assommant ou électrocutant."
Prochaine étape:
l'élimination des cadavres in situ pour ne plus recourir aux services d'équarrissage, en cours de privatisation, dont les prix augmentent.
à l'instar des pratiques mises en oeuvre en Amérique du Nord, l'interprofession Inaporc teste un prototype de biodigesteur - un immense composteur visant à accélérer à l'aide
d'enzymes la dégradation des cadavres - à destination des élevages qui disposeront ainsi de la filière complète pour gérer un volume de cadavres évalué à 96 kg par truie et par an.
Des animaux "propres, dans un lieu propre"
Pourtant, tous les professionnels n'ont pas le regard aussi négatif.
Pour Christine Drouilhet, éleveur dans l'Ain, le système d'élevage qu'elle ne veut pas appeler "intensif" mais "en bâtiment" a du bon. Ses animaux qu'elle affectionne sont "propres
dans un lieu propre".
Paille ou plein air génèrent à ses yeux trop de risques sanitaires. Et "en mangeant de la paille, le cochon fait plus de gras, ce qui ne plaît pas au consommateur. Les abattoirs,
d'ailleurs, refusent les carcasses grasses."
Christine Drouilhet a le geste expert; elle pratique "en un éclair et sans faire couiner les bêtes" castration et caudectomie, qui restent des pratiques "incontournables". Mais
elle a pu supprimer section et même meulage des dents:
"Les porcelets se bagarrent moins, car la nouvelle race de truie donne plus de lait."
Des animaux "cocoonés"
Dehors, "il y a les intempéries, il fait trop froid ou trop chaud". Dans le bâtiment maintenu à 22°C, ses animaux sont "cocoonés", assure-t-elle.
"Les scientifiques s'intéressent à la biologie de l'animal, mais le bien-être animal dans un élevage, c'est le rapport de l'animal avec ses congénères, son environnement et ses
éleveurs. Or, tout cela a été supprimé en élevage industriel. Les animaux souffrent. Et cette souffrance est contagieuse, affirme encore la sociologue Jocelyne Porcher.
Pour supporter la violence envers les animaux, poursuit-elle, les personnes "se blindent", font valoir leur courage ou leur virilité, participent à la course à la production comme
dans une "compétition sportive."
"Des animaux qui ont des noms"
Elle sait de quoi elle parle. Elle fut d'abord éleveuse de brebis, puis a travaillé dans une porcherie avant de suivre un cursus complet de formation et de devenir sociologue
spécialiste des relations homme-animal.
Au fil de ses enquêtes, elle a rencontré Christine Tribondeau et toutes deux témoignent de leurs expériences passées dans Une vie de cochon, à travers les questionnements d'une
enfant (1).
"Un jour, on mesure son mal-être, sa fatigue morale et physique, l'énergie dépensée pour tenir. On se dit qu'on est des sauvages. Et moi qui voulais m'occuper d'animaux
et conseiller les éleveurs."
Au bout de neuf ans, Christine Tribondeau a jeté l'éponge. Un de ses collègues a, lui aussi, quitté la porcherie pour "s'occuper d'un élevage avec des animaux qui ont des noms".
Elle a refait sa vie dans le social et enfoui son passé dont elle n'a reparlé que neuf ans plus tard.
Auteur: Marie Verdier
Source: La Croix du 23 juin 2008
Si la notion de maltraitance est difficile à définir et à délimiter dans le cas des animaux de compagnie, c'est encore plus vrai en ce qui concerne les animaux de la ferme. Méconnus,
les bovins, ovins, équidés, caprins, volailles et lapins ont des besoins spécifiques qui touchent aussi bien à l'espace (intérieur comme extérieur) dans lequel ils évoluent,
qu'à leur mode alimentaire ou encore à leur adaptation aux aléas climatiques. Ainsi, un cheval de course à la retraite ne présentera pas la même résistance au
froid hivernal qu'un cheval de trait et devra, par conséquent, bénéficier de soins particuliers.
Or, il règne aujourd'hui un réel flou au sein de la réglementation légiférant sur le sort de ces animaux d'élevage.
L'absence d'un texte unique, qui servirait de référence, rend son approche plus abstraite et laisse chacun plus ou moins libre d'en faire son interprétation personnelle. Ainsi, à l'heure
actuelle, quatre textes distincts s'entrecoupent pour veiller à la protection de ces animaux: le code rural, le code pénal, le règlement sanitaire départemental et les arrêtés ministériels.
Consciente que cette législation déficiente dessert ceux qu'elle est supposée protéger, la Protection Mondiale des Animaux de la Ferme (PMAF), association fondée en 1994, inaugurera dès
l'automne prochain le plan "Vigiferme". Celui-ci aura pour objectifs de déterminer les besoins spécifiques à chaque espèce, de servir de plate-forme de consultation pour
une meilleure clarté des points réglementaires invoqués et de favoriser l'intervention des "autorités compétentes" (1) en cas de sévices avérés.
S'adressant tout à la fois aux professionnels, aux associations, aux maires, aux gendarmes et au grand public, ce programme mise sur la diffusion d'une information claire et détaillée,
consistant en la mise à disposition d'un livret de 70 pages récapitulant la législation en vigueur ainsi qu'un fascicule de 16 pages consacré exclusivement aux conditions de garde des
animaux d'élevage exposés aux intempéries. Ce dernier pose des principes clés tels que la nécessité de laisser à disposition de tout animal un point d'eau accessible, le retrait de tout
objet saillant pouvant entraîner des accidents, la présence d'un abri en période de grands froids ou d'un espace ombragé lors de fortes chaleurs. Parallèlement, Vigiferme propose aux unités
d'intervention (gendarmes) et aux autorités locales (maires) des formations destinées à se familiariser avec la réglementation actuelle. Enfin, dès le 1er novembre 2008,
un site Internet sera créé afin d'informer sur la marche à suivre en cas de suspicion de mauvais traitements.
Auteur: Cécile Cassier
Source: Univers Nature du 1 septembre 2008
1- En cas d'élevages insalubres ou d'abandon d'animaux, le maire est habilité à intervenir. Si des actes de cruauté envers les animaux sont observés, on recourra plutôt aux services des gendarmes et des policiers. Enfin, sous l'autorité du préfet, la Direction Départementale des Services Vétérinaires (DDSV) peut être saisie à tout moment.